Affichage des articles dont le libellé est Gaspard Koenig. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Gaspard Koenig. Afficher tous les articles

octobre 27, 2018

Rhôoooooo!! les libertariens sont parmi vous !

Ce site n'est plus sur FB (blacklisté sans motif), alors n'hésitez pas à le diffuser au sein de différents groupes ( notamment ou j'en étais l'administrateur), comme sur vos propres murs respectifs. D'avance merci. L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture. Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...Merci de vos lectures, et de vos analyses. Librement vôtre - Faisons ensemble la liberté, la Liberté fera le reste. N'omettez de lire par ailleurs un journal libéral complet tel que Contrepoints: https://www.contrepoints.org/ Al, 

 PS: N'hésitez pas à m'envoyer vos articles (voir être administrateur du site) afin d'être lu par environ 3000 lecteurs jour sur l'Université Liberté (genestine.alain@orange.fr). Il est dommageable d'effectuer des recherches comme des CC. Merci


Les libertariens sont parmi nous

Un petit rappel de Libération de septembre 2015; Remarquez il y a de quoi se marrer, mais il faut lire lol. Le plus incroyable est que nos propres responsables libertariens français comme belges voire davantage n'y figurent même pas, seulement substitués par de libéralopithèques de sociale-démocratie !
Voici l'affabulation médiatique de nos concepts de Liberté !
Al,

Né dans les années 60, le mouvement ultra individualiste reste marginal politiquement mais essaime aujourd’hui dans la pop culture. 

Le 13 avril, Vit Jedlicka plantait fièrement son drapeau jaune et noir sur sept kilomètres carrés de terres boisées et inondables, coincées entre la Croatie et la Serbie. Ce marécage inhabité, grand comme quinze fois le Vatican, est amené à devenir le Liberland, «un état avec le moins d’état possible», si l’on en croit ce Tchèque joufflu de 31 ans, décidé à donner chair au rêve de tout libertarien qui se respecte.
Liber-quoi? Pour ceux qui ne seraient pas familiers avec ce fatras d’idéologies ultra-libérales et individualistes, autant s’en remettre au Petit Larousse, toujours dans l’air du temps, qui a intronisé le mot dans son édition 2014. A «libertarien», on trouve la définition suivante :  

«Un partisan d’une philosophie politique et économique qui repose sur la liberté individuelle conçue comme fin et moyen. Les libertariens se distinguent des anarchistes par leur attachement à la liberté du marché et des libéraux par leur conception très minimaliste de l’état.»

Proche des thèses libérales du philosophe français du XIXe siècle Frédéric Bastiat, le libertarianisme a réellement pris forme aux Etats-Unis dans les années 1960, au carrefour de l’anti-communisme viscéral des Républicains, de la contre-culture libertaire et des économistes de l’école de Chicago (1). Se voulant à «l’extrême centre», les libertariens prônent la liberté en toute chose. Ils peuvent ainsi se battre pour l’abolition de l’impôt et la fin des banques centrales, le mariage gay et le port d’arme, la défense de la vie privée et la légalisation de la prostitution ou des drogues, la fin des frontières et le «droit à la discrimination», et bien évidemment la privatisation de tous les services gouvernementaux, mis à part quelques fonctions régaliennes…
C’est probablement Tim Moen, candidat aux législatives canadiennes de 2014, qui a le mieux résumé le libertarianisme moderne en faisant campagne avec ce slogan: «Je veux que les couples gays mariés puissent défendre leurs plants de marijuana avec leurs fusils.» Une philosophie résolument capitaliste du «vivre et laissez vivre», attrape-tout et belliqueuse, dans laquelle peuvent se reconnaître les ultra-conservateurs du Tea Party américain comme les cyber-activistes d’Anonymous… Si le Liberland a choisi un petit oiseau pour symboliser la liberté sur son blason, les libertariens américains, le doigt sur la gâchette, préfèrent généralement l’image du porc-épic, la mascotte de leur festival annuel dans le New Hampshire, voire du serpent à sonnettes, qu’on retrouve sur nombre de bannières, assorties du motto «ne me marche pas dessus...». 
Avec ses pulls col roulé et ses boucles d’éternel étudiant en philo, le sénateur républicain Rand Paul, candidat à la présidentielle américaine et fils du député libertarien Ron Paul, a relancé l’intérêt des médias autour du mouvement. «L’homme le plus intéressant de la politique américaine», selon une couverture de Time, n’a pourtant que peu de chances d’emporter la primaire républicaine. Car question politique, les libertariens, trop puristes et trop anti-système, sont condamnés à échouer, quand bien même les instituts de sondages américains estiment autour de 15 % et 20 % le nombre d’électeurs partageant leur sensibilité.

Mouvement en expansion

«Ils poursuivent une utopie qui se saborde dès qu’elle est en contact avec la réalité», assène Sébastien Caré, politologue à l’université catholique de Lille et spécialiste du mouvement. Ils pourraient bien, en revanche, avoir déjà gagné la bataille des esprits. L’été dernier, le New York Times se demandait déjà si «le moment libertarien» était arrivé. 

«Cette idéologie, qui a toujours été fortement marginale historiquement, est devenue une réalité concrète avec l’avènement de “l’esprit start-up” ces dix dernières années, observe le philosophe Eric Sadin, auteur de la Vie algorithmique. Cette pensée, fondée sur la conviction que le désir individuel, présenté comme progressiste, prévaut sur tout, dans une indifférence absolue des états et des acquis historiques, a essaimé sur la planète entière. »

Dans la bouche des politiques, des artistes ou des entrepreneurs, l’adjectif « libertarien » n’a jamais été aussi à la mode. D’ailleurs, 300 000 internautes ont déjà demandé à être naturalisés par le Liberland, qui ne bénéficie pourtant d’aucune reconnaissance internationale. « Le moment libertarien que l’on vit actuellement est plus culturel que politique ou même économique. Les nouvelles technologies ont donné à la majorité la possibilité d’individualiser sa vie, de faire ses propres choix », estime Nick Gillespie, co-rédacteur en chef de Reason, mensuel fondé en 1968 et principal journal d’opinion libertarien aux Etats-Unis. Malgré un tirage papier modeste de 60 000 exemplaires, le site de Reason attire 4 millions de visiteurs par mois, un chiffre en « augmentation constante » selon lui. Pour ce fan de punk-rock, enfant de la contre-culture des années 1960, c’est à travers « l’uberisation » (2) de l’économie, l’acceptation du mariage gay ou la légalisation du cannabis que se joue « le passage au XXIe siècle, où chacun aura l’espace nécessaire de décider pour lui-même, une fois que l’ordre politico-économique actuel se sera effondré ».


Des stars en renfort

Si la philosophe Ayn Rand, figure tutélaire du mouvement et papesse spirituelle de la Silicon Valley a toujours la cote, «les libertariens n’ont aujourd’hui plus de grandes figures intellectuelles de son aura ou de celle de Murray Rothbard dans les années 1950-60, note le politologue Sébastien Caré. En revanche, de plus en plus de stars revendiquent cette appellation. Ces idées passent désormais plus à travers la pop culture que l’intelligentsia».
A l’image des cowboys souvent solitaires de ses films, Clint Eastwood a longtemps incarné l’image de l’anar de droite isolé dans le marigot progressiste hollywoodien. « J’ai toujours été libertarien, déclarait l’acteur-réalisateur au Guardian en 2008. Laissons les gens tranquilles. Que chacun fasse ce qu’il veut. Et surtout, qu’on ne se mêle pas des affaires des autres. » L’ancien maire de Carmel (Californie) considère que « donner du pouvoir [aux politiciens] », c’est prendre le risque « qu’ils le détournent aussitôt contre vous ». Avec le temps, l’inspecteur Harry a fait des émules. Vince Vaughn, l’idole des fêtards et star de la série True Detective, est devenu le porte-parole le plus bruyant et inattendu des idées libertariennes. Dans GQ, il a récemment comparé le port d’armes à la liberté d’expression, comme moyen d’autodéfense contre un gouvernement abusif. Invité par une association étudiante libertarienne sur le campus de UCLA en avril, il assurait que son activisme lui avait valu moult compliments à Hollywood, malgré l’omerta du milieu. Même le power couple Jolie-Pitt serait acquis aux thèses libertariennes… Lesquelles semblent imprégner nombre de succès du box-office de ces dernières années. «A la télévision, tous les shows qui traitent du gouvernement montrent à quel point l’état est néfaste. Dans House of Cards, le président est un meurtrier !  s’enthousiasme Matt Welch, l’autre tête pensante de Reason. Et que dire de la science-fiction adolescente qui cartonne en librairie ! La saga Hunger Games est farouchement anti-autorité. Ce n’est pas étonnant que les jeunes générations plébiscitent ces histoires : elles n’ont jamais vu de gouvernement fonctionner correctement. »

L’attaque des superhéros

Il y a enfin cette obsession contemporaine pour les superhéros, incarnations littérales de la supériorité individuelle bénéfique à la société. La trilogie Iron Man n’est-elle pas la démonstration qu’un entrepreneur milliardaire est plus efficace que l’armée de l’Oncle Sam pour assurer la paix dans le monde ? Le prochain Avengers de Marvel, intitulé Civil War et dont la sortie est prévue pour 2016, fait carrément de l’insoumission des héros en capes au gouvernement le point crucial de l’intrigue. Après une énième orgie de destruction super-héroïque, les politiques votent un Superhuman Registration Act pour contrôler les interventions de Hulk, Spiderman et autres. Et qui s’oppose au méchant Washington D.C. voulant réglementer l’activité des sauveurs de l’univers ? Captain America bien sûr. Pour Matt Welch, «la gauche américaine est terrifiée de voir la jeunesse devenir libertarienne». 40% des lecteurs de Reason en ligne ont moins de 35 ans, précise-t-il. Une génération biberonnée aux Indestructibles, le film d’animation des studios Pixar, bourré de clins d’œil appuyés à l’idéologie objectiviste et élitiste d’Ayn Rand, et surtout à la satire de South Park.
Matt Stone et Trey Parker, les créateurs du cartoon à l’antenne depuis 1997, n’ont jamais fait mystère de l’agenda libéral-libertaire poursuivis par Cartman et ses potes. « On déteste les conservateurs, mais on hait vraiment les gauchistes », a lâché un jour Stone, alors que Parker a sa carte au parti libertarien… Selon Welch, le retour du politiquement correct serait en grande partie responsable de ce retour de flamme.

 « La gauche américaine aujourd’hui n’est pas fun ! On est loin des années 70 et du sexe, drogue et rock’n’roll. Les démocrates sont prisonniers de la bien-pensance. Cette nouvelle rigueur morale de la gauche actuelle pousse de nombreux jeunes vers nous… »

Le philosophe Eric Sadin acquiesce à regret: 

«Ils ont réussi à faire croire que leur forme de néo-ultralibéralisme avait une dimension inéluctable, car du côté du cool, de la liberté. Ceux qui ne sont pas d’accord avec eux sont des emmerdeurs crispés ou des rétrogrades : c’est effrayant.» 

En France, les libertariens restent discrets. Emmanuel Bourgerie, l’auteur du blog «Le French Libertarien» est un développeur expatrié en Irlande, passé par le parti Pirate et les Verts. Se définissant comme un «électron libre, venu de la gauche», notamment via la défense des libertés numériques, il reconnaît avoir du mal à se situer sur l’échiquier politique français, à la recherche d’une illusoire troisième voie…
Le spécimen hexagonal du mouvement le plus médiatique est probablement Gaspard Koenig (3), 33 ans. Habitué des plateaux de télé, cet essayiste tout-terrain à la tête de son propre think-tank préfère le terme «libéral», plus frenchie, à celui de libertarien. A l’œil nu, la différence n’est pas flagrante. «On ne peut pas différencier les libertés économiques et sociétales, entre Uber et la GPA », affirme-t-il, rêvant de réconcilier les « juristes barbus et les économistes chauves ». Pour cela, il mise sur une prochaine « uberisation de la politique » par la génération Y… qui sera, ou ne sera pas, libertarienne. —  

Guillaume Gendron

(1) Ces économistes, Milton Friedman en tête, étaient de fervents défenseurs de l’économie de marché, résolument opposés à l’intervention des états et aux régulations.
(2) Uberisation : néologisme désignant la prédation de pans entiers de l’économie (comme les taxis avec Uber) par des entrepreneurs venus du web en faisant fi des régulations et des modèles existants.
(3) Auteur de le Révolutionnaire, l’expert et le geek, combat pour l’autonomie, éditions Plon, 2015.


FOCUS : L’égoïsme connecté, Made in Silicon Valley
Pendant longtemps, le profil Twitter de Travis Kalanick, PDG d’Uber, donnait à voir la couverture d’un livre de la romancière américaine Ayn Rand, intitulé la Source vive. Travis Kalanick n’est pas la seule figure de la « Valley » à admirer cette auteure peu connue des Européens, figure d’un libertarianisme radical, hyper-individualiste et ultra-capitaliste. Peter Thiel, un des créateurs de la solution de paiement en ligne Paypal et business angel influent, investisseur précoce de Facebook, est lui aussi un zélote de la romancière et philosophe. Il lui a d’ailleurs consacré, en 2009, un dense essai intitulé l’Education d’un libertarien. Peter Thiel a également soutenu le candidat libertarien Ron Paul à la présidentielle en 2012 et investi dans le Seasteading Institute, un projet visant à créer des îles artificielles dans les eaux internationales uniquement régies par les principes du mouvement.
La liste des héritiers d’Ayn Rand est longue. Parmi eux, Jeff Bezos, patron d’Amazon, Jimmy Wales, fondateur de Wikipédia, Elon Musk, nouvelle coqueluche des médias et boss de Tesla Motors, Scott McNealy, ancien PDG de l’éditeur de logiciels Sun Microsystems, Craig Newmark, créateur du site Internet Craigslist, sans parler des promoteurs du transhumanisme tel Max More…

 Figure de proue
Ayn Rand, née en 1905 à Saint-Pétersbourg et décédée à New York en 1982, est considérée outre-Atlantique comme une des penseuses les plus influentes du XXe siècle. Ses romans phares, la Source vive (1943) et la Grève (1957), demeurent aujourd’hui des best-sellers, vendus à plusieurs millions d’exemplaires. Ils posent les fondements de sa philosophie, à savoir un rejet farouche du collectivisme et la défense d’un « égoïsme rationnel », pierre angulaire de la réussite et du bonheur. Chez Ayn Rand, il s’agit de privilégier à tout prix la liberté individuelle sur l’égalité, l’individu sur le collectif. Cette pensée prend source dans l’histoire personnelle de la romancière, immigrée russe qui a passé sa jeunesse en URSS. Marquée au fer rouge par cette expérience et profondément anti-communiste, elle fut témoin à charge lors des procès sous le Maccarthysme.
L’adhésion de la Silicon Valley au libertarianisme « randien » est-elle opportuniste ou s’agit-il d’une conviction profonde ? Un peu des deux, répond Sébastien Caré, spécialiste de la pensée libertarienne. 

 « Le libertarianisme satisfait parfaitement les intérêts des patrons de la Silicon Valley, eux qui veulent détruire les structures existantes, considérées comme des entraves à la liberté d’entreprendre, et promouvoir des innovations dites disruptives, explique-t-il.  Ils partagent la croyance que les nouvelles technologies sont une promesse d’émancipation de l’individu de toute autorité, couplée à l’idée que l’on s’accomplit en faisant fi du collectif. Il y a également une dimension messianique chez Rand qui séduit ces hommes qui souhaitent véritablement changer le monde. Mais je pense aussi que la Valley est profondément libertarienne, n’oublions pas que la Californie est le berceau du libertarianisme, né dans les années 60 du mariage de la nouvelle gauche, issue de la contre-culture californienne, et du libéralisme classique. » 

Le cas d’Uber est emblématique de la volonté de mettre à bas des secteurs réglementés et protégés par l’état, tout comme l’essor du BitCoin, cette devise alternative qui s’attaque au monopole des états sur l’émission de la monnaie. Courant de pensée fourre-tout, éclaté en de nombreuses chapelles, le libertarianisme s’offre aujourd’hui une nouvelle vitrine avec la Silicon Valley et, discrètement, infuse la société. Du reste, ce libertarianisme « high-tech », randien, heurte-t-il souvent la vieille garde libertarienne, parfois bien installée dans l’establishment de Washington. Trop tapageur, trop arrogant et en rupture avec une certaine orthodoxie. 

« A titre d’exemple, les libertariens sont généralement contre la propriété intellectuelle alors que les libertariens de la Silicon Valley souhaitent eux que l’état protège leurs brevets, souligne Sébastien Caré. C’est la même chose avec l’immigration, les libertariens sont pour l’ouverture totale des frontières. A l’inverse, Mark Zuckerberg souhaite qu’elle soit réservée aux élites. » 

Une vision de la liberté très restrictive en fin de compte.—  
Fabien Benoît


Source

Rhôooooo des libertariens !!!

 







septembre 09, 2017

Code du travail (réactualisation 20/09/17-Post I)

Ce site n'est plus sur FB (blacklisté sans motif), alors n'hésitez pas à le diffuser au sein de différents groupes ( notamment ou j'en étais l'administrateur), comme sur vos propres murs respectifs. 
D'avance merci. 

 L'Université Liberté, un site de réflexions, analyses et de débats avant tout, je m'engage a aucun jugement, bonne lecture. Je vous convie à lire ce nouveau message. Des commentaires seraient souhaitables, notamment sur les posts référencés: à débattre, réflexions...
Merci de vos lectures, et de vos analyses. 

 Librement vôtre - Faisons ensemble la liberté, la Liberté fera le reste. 

Al,




Sommaire:

A) Ordonnances sur le Code du travail : un vrai progrès qui en appelle d'autres - Agnès Verdier-Molinié - IFRAP

B) Christiane tire sur le code ! - Christiane Chavane - Delanopolis

C) En finir avec les privilèges de l'aristocratie d'Etat - Gaspard Koenig - Les Échos

D) Gouverner ou taxer, il faut choisir - Les Arvernes - Atlantico

E) L'ordre de la dette - Enquête sur les infortunes de l’État et la prospérité du marché - Benjamin LEMOINE - La découverte

F) Du public au privé : le grand manège des hauts fonctionnaires - Benoît Collombat - France Inter

G) Concurrence à deux niveaux: mettre un terme aux oligopolesJohan Hombert - HEC Paris

H) L’impôt, c’est le vol - Richard Hanlet - Contrepoints

I) Loi travail : analyse d’un little Bang - Anna Christina Chaves - Guillaume Brédon - Fondation Concorde




A) Ordonnances sur le Code du travail : un vrai progrès qui en appelle d'autres
 
Beaucoup ont loué l'avancée que représentent les cinq ordonnances sur le Code du travail du gouvernement Philippe. Ceux-là ont eu raison, car ces ordonnances vont dans le bon sens. Ils ont néanmoins omis de dire que la réforme progresse tout doucement et que beaucoup d'angles morts subsistent.
Les mesures explosives à adopter, on les connaît bien en France : redéfinir la cause réelle et sérieuse du licenciement ; repousser les obligations liées au passage de certains seuils quant au nombre de salariés ; réduire le nombre de salariés protégés ; assouplir les conditions d'utilisation du CDD ; supprimer le monopole de présentation des syndicats au premier tour des élections professionnelles ; supprimer les 35 heures. Bref, une tâche herculéenne de transformation - le mot est à la mode - de notre Code du travail.
Sur la question de la définition de la cause réelle et sérieuse, le premier projet de loi El Khomri avait montré des velléités d'agir, puis le gouvernement de l'époque avait reculé. Il s'était en définitive contenté d'élaborer un barème indicatif pour les indemnités de licenciements jugés abusifs. Il aurait été souhaitable, cette fois-ci, de reconsidérer ce motif réel et sérieux pour permettre aux entreprises réorientant leurs activités de pouvoir l'invoquer. Le gouvernement Philippe a préféré fixer un plafond aux indemnités de licenciements jugés abusifs. Mais ce plafond est très proche du barème indicatif institué l'an dernier. Ce barème recommandait 24 mois d'indemnités pour 30 ans d'ancienneté. Or le gouvernement plafonne maintenant à 20 mois d'indemnités en pareil cas. Le juge fera-t-il du maximum la règle ? La jurisprudence le dira.
On pouvait légitimement espérer, par ailleurs, que la durée légale du travail ne soit plus fixée à 35 heures. Or il faudra se contenter d'une inversion limitée de la hiérarchie des normes : la possibilité, pour l'employeur, de négocier en direct avec les salariés à la majorité des deux tiers… mais uniquement dans les entreprises jusqu'à 20 salariés et à condition qu'il n'y ait pas de délégué du personnel. Entre 20 et 50 salariés, il faudra négocier avec un salarié mandaté. Et dans les grandes entreprises, exit le référendum à l'initiative de l'employeur, alors que le programme d'Emmanuel Macron le prévoyait pour toutes les entreprises, grandes ou petites. S'agissant des entreprises au-delà de 50 salariés, pour pouvoir espérer modifier le temps de travail, les primes ou les rémunérations, il faudra donc signer des accords majoritaires avec les syndicats, ce qui est loin d'être aisé.
En matière de seuils sociaux, on peut regretter que les ordonnances renforcent encore le caractère repoussoir du seuil de 50 salariés. Ce dernier est déjà une cause de l'absence de développement des PME. Or, en lieu et place de la réforme des seuils sociaux, le gouvernement engage la fusion des instances représentatives (comité d'entreprise, délégués du personnel et comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail) dans un comité social et économique (CSE). On ne sait pas encore si ce changement permettra de faire baisser le nombre d'heures de délégation. Ce sera le sujet d'un décret très attendu à l'automne. Au total, le secteur privé compte 600.000 salariés protégés. Diminuer ce nombre est essentiel.
Plutôt que d'assouplir les conditions d'utilisation du CDD dans le Code du travail, le gouvernement a choisi d'autoriser un recours plus large au contrat de chantier. À ce jour, le contrat de chantier est uniquement utilisable dans le secteur du BTP. Ce contrat à durée indéterminée - sans date de fin précise, contrairement à un CDD - s'arrête au terme de la mission pour laquelle le salarié est engagé. Mais le recours plus large au contrat de chantier, quoique désormais possible sur le papier, reste soumis au feu vert des partenaires sociaux. Des accords de branche seront nécessaires pour l'instituer dans d'autres secteurs que le BTP. Ce n'est pas gagné.
La loi prévoit qu'un CDD dans le privé ne peut pas être utilisé pour un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise. Le CDD ne peut être renouvelé que 2 fois pour une durée maximale de 2 ans (et dans certaines conditions). Dans le public, un CDD peut être signé pour 3 ans et durer jusqu'à 6 ans. Or les Italiens, eux, ont modifié leur Code du travail pour permettre aux entreprises de leur pays d'embaucher en CDD sans avoir besoin de motiver le recours au contrat à durée déterminée. Ces CDD peuvent être renouvelés 5 fois pour une durée maximale de 3 ans.
Quant aux super-accords de compétitivité qui permettent à une entreprise de modifier des paramètres aussi importants que les salaires, la durée du travail et son organisation «afin de répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l'entreprise ou en vue de préserver ou de développer l'emploi», nul ne peut prédire s'ils seront plus efficaces que les accords de maintien dans l'emploi prévus par l'accord national interprofessionnel 2013, qui ont fait pschitt.
Autre angle mort de ces ordonnances : nul ne sait ce qui a été conclu en sous-main avec FO et qui expliquerait la bienveillance de ce syndicat. On peut craindre que le gouvernement ait promis de compenser intégralement l'augmentation de 1,7 point de CSG pour les agents publics, alors que ces derniers ne cotisaient ni à l'assurance-chômage ni à l'assurance-maladie. Pour le budget, un tel cadeau aurait un coût de 4 milliards d'euros par an. Peut-être aussi le gouvernement a-t-il promis de ne toucher que très à la marge aux régimes spéciaux de retraites des agents publics…
Nous serons sans doute fixés en 2018. Un élément de l'échange est certain : un engagement de campagne d'Emmanuel Macron, la création du chèque syndical - titre de paiement émis par l'employeur à destination du salarié, qui peut l'utiliser pour financer un syndicat de son entreprise sans obligation d'adhésion -, était mentionné noir sur blanc dans la loi d'habilitation. Or il a disparu et ne figure pas dans les ordonnances. Le sujet du financement et de la représentativité de nos syndicats demeure pourtant crucial. Espérons que le dossier est simplement reporté et non enterré.








B) Christiane tire sur le code !

Christiane Chavane est de plus en plus fatiguée des réformettes macroniennes ...

LA REVOLUTION EN MARCHE (LREM)
Euh… C’est vite dit.

La Macronette du jour ce sont les ordonnances de la loi travail et la réforme (tte) du RSI.

On se demande comment les syndicats peuvent râler et les patrons applaudir… du moins sauf ceux du CAC 40 pour lesquels toute entrave à la liberté d’entreprendre limite les concurrents potentiels.

Quelques mesures phares nous éclairent :
- Simplification de la procédure de reconversion pour les salariés licenciés, bon OK, c’était une usine à gaz, ça deviendra une usine à pétrole.
- Plafonnement des indemnités prud’homales, mais en échange augmentation de 25 % des indemnités légales de licenciement. Le patron obligé de faire un plan de licenciement économique va le sentir passer, il n’a plus qu’à fermer directement, par contre les patrons voyous prendront moins de risques.
- Passage obligé par les conventions collectives, ce qui plaît à FO mais beaucoup moins aux TPE qui n’ont pas de représentation dans les instances « collectives » et n’ont donc pas voix au chapitre.
Et le RSI dans tout ça ? C’est bien de supprimer cette instance de bandits de grands chemins, mais adosser le régime des indépendants au régime général reviendra à leur faire payer des charges supplémentaires, notamment les Assedic, alors que jusqu’ici ils avaient la possibilité de prendre des assurances chômage privées plus intéressantes. Et puis c’est désormais l’Urssaf qui se chargera de récolter les fonds. Notez que c’était déjà l’Urssaf qui faisait les calculs pour les innommables agents du RSI. Les erreurs étaient nombreuses. Elles vont le rester puisque c’est le même logiciel. Mais si le RSI est un interlocuteur imbuvable, vous allez adorer l’Urssaf…
Cerise sur le rata : le plafond de CA des auto-entrepreneurs va doubler. Les artisans qui facturent la TVA vont adorer. Alors qu’il aurait été si simple d’en faire un démarrage d’activité et de mettre tout le monde au même diapason.


REVOLUTION REPUBLICAINE

Oui les électeurs voulaient se débarrasser d’une classe politique indigente pour faire place à des nouveaux issus de la société civile.

Le résultat est époustouflant. Outre le fait que la moitié des nouveaux députés LREM sont des minables grenouillant dans les instances du PS sans arriver à faire leur trou (et pour cause), nous avons droit à une cannibale qui mord les taxis et maintenant un bas du front juste bon à massacrer son interlocuteur à coups de casques. On savait que les discussions parlementaires étaient parfois animées, mais la bagarre, c’est nouveau sous la 5e. Et l’acharnement jusqu’à envoyer l’autre en soins intensifs, pas à dire, pour l’esprit de la démocratie, on repassera. Ça c’est du renouvellement ou je ne m’y connais pas.


BAISSE DES CHARGES

La hausse de la CSG pour les salariés, les transactions financières et les riches retraités de plus de 1200 euros par mois, c’est tout de suite. La baisse des charges salariales, c’est pour quand on pourra, donc aux calendes grecques, et la transformation du CICE en baisse de charges patronales, on n’en parle même plus.
Les retraités selon Macron sont des nantis, d’ailleurs ils sont habillés à l’œil en Vuitton, alors…
Du coup une vielle dame se fait attaquer en allant se recueillir sur la tombe de son mari, et se retrouve avec le col du fémur cassé parce que son agresseur pensait que les vieux étaient riches. Il a trop regardé BFMTV et écouté Macron. Cette pauvre femme avait une retraite de 800 euros/mois.
Mais les étudiants aussi sont riches puisqu’il faut leur sucrer 5 euros d’APL. Du coup Macron, qui ose tout, demande aux proprios de baisser le loyer de 5 euros. Il a dû oublier que ça représente au moins 3 euros de perte d’impôts. N’est pas financier qui veut. Apparemment faisander chez Rothschild est insuffisant. Pourtant il connaît les difficultés des étudiants : ne disait-il pas que lorsqu’il faisait sa prépa, il avait dû se serrer la ceinture avec 1000 euros par mois d’argent de poche ? 

Christiane Chavane
Source blog de Serge Federbusch








C) En finir avec les privilèges de l'aristocratie d'Etat

Les désormais célèbres ordonnances sur le Code du travail favorisent incontestablement le licenciement, en plafonnant les indemnités (...)

Les désormais célèbres ordonnances sur le Code du travail favorisent incontestablement le licenciement, en plafonnant les indemnités prud'homales, en autorisant des ruptures conventionnelles collectives ou en simplifiant l'obligation de reclassement. La littérature économique n'offre aucune conclusion claire sur le lien entre droit du travail et taux de chômage (pour une analyse contre-intuitive, on pourra relire un rapport du CAE signé...





D) Gouverner ou taxer, il faut choisir

Alors que le nouveau pouvoir a passé le cap des 100 premiers jours, un moment essentiel se profile : l’élaboration du Projet de Loi de Finances pour 2018. Essentiel, car au-delà de la communication, l’adoption du budget est le cœur de la démocratie représentative. De la Charte des Barons britannique imposée à Jean-sans-Terre en 1215, en passant par les Etats Généraux du Royaume de France, et jusqu’à la « partie de thé » de Boston en 1773, la démocratie représentative s’est bâtie autour d’un fil rouge, résumé par la formule américaine « pas de taxation sans représentation ».
Cette formule rappelle que le gouvernant ne se voit déléguer le pouvoir politique – et donc celui de prélever l’impôt – par le gouverné, que pour tant que ce dernier est bien représenté. Elle place ainsi l’impôt au cœur du processus démocratique.
La réalité, malheureusement, est bien différente. En fait de grand débat démocratique, la rationalisation du parlementarisme a largement confiné le Parlement à un rôle d’enregistrement des décisions de l’Exécutif. De même, le temps est loin où l’impôt, dont Benjamin Constant disait qu’il était « d’autant plus odieux qu’il s’exécut(ait) avec les solennités de la loi », était rare, peu élevé, et décidé après des débats de fond. Les semaines récentes l’ont encore illustré. Quelques dixièmes de pourcentage manquent pour atteindre 3% de déficit ? L’on s’empresse, par un moyen que l’Exécutif admet « peu intelligent », de rogner les aides au logement. La taxe sur les dividendes a été déclarée non conforme par la CJUE ? L’on envisage un tour de passe-passe pour trouver quand même le moyen de faire payer « une taxe temporaire » supplémentaire aux grandes entreprises.
Disons-le tout net : avoir une administration fiscale honnête et efficace, est un atout pour la France, et l’une des raisons pour lesquelles en dépit de son impéritie, les marchés lui font encore crédit. Tout autre est la question de la montée continue de la pression fiscale, qui a poussé notre taux de prélèvement obligatoire autour des 45%. Les effets pervers d’une telle situation sont connus – quoique soigneusement ignorés : désincitation au travail (fuite des cerveaux que l’on nie, courbe de Laffer), complexité insupportable pour le citoyen d’une fiscalité kafkaïenne, incapacité à faire de l’impôt la cause de tous et donc un lien citoyen (moins de la moitié des ménages acquittent l’impôt sur le revenu). Qu’il soit permis de s’attarder ici sur deux autres effets particulièrement nocifs du recours systématique à l’impôt.
Premièrement, le recours trop aisé à l’impôt, autorisé par la docilité du Parlement, l’efficacité de l’administration fiscale, et le civisme patient d’une partie essentielle des Français, rend superfétatoire l’établissement d’une véritable stratégie économique. Bien sûr, l’on sait depuis Keynes que l’économie étant un circuit, une politique économique mêle politique de l’offre et politique de la demande. Le moment dans le cycle économique détermine l’endroit où placer le curseur, parfois du coté de l’offre, parfois du coté de la demande. Pourtant, de Jacques Chirac à François Hollande en passant par Nicolas Sarkozy, notre pays se distingue par une incapacité durable à définir une ligne économique claire. Le pilotage à vue prévaut. Les raisons sont nombreuses. Mais la « facilité » offerte par le recours permanent et – apparemment – sans douleur à l’impôt, jumeau noir de la politique budgétaire du rabot, en est l’une des raisons fondamentales. C’est la raison pour laquelle l’un des rares fils rouges de la politique économique française depuis trente ans a été l’augmentation continue de la pression fiscale.

Deuxièmement, le recours à la facilité qu’autorise l’impôt est contraire à l’esprit des politiques publiques. Les politiques publiques, contrairement aux intérêts privés dont les objectifs de rentabilité prévalent sans que cela soit péjoratif, arbitrent entre des finalités contradictoires. Ainsi, politique de santé et éthique donnent lieu à des arbitrages difficiles quand il s’agit de concilier vie en bonne santé et espérance de vie. De même, fermer une maternité en milieu rural conduit à arbitrer entre l’aménagement du territoire (qui suggère de maintenir des maternités) et la protection des enfants et des mères (le risque périnatal explosant sous un certain seuil d’accouchements à l’année).
Le recours à l’impôt, par sa facilité, assèche les politiques publiques en dispensant de se pencher sur la complexité des phénomènes. C’est particulièrement le cas quand une dimension morale vexatoire ajoute à la brutalité de l’impôt. Que l’on songe ici à la question du tabagisme, très largement traitée à coup d’augmentation de prix et de mesures moralisantes (paquet neutre). Pourtant, en la matière, l’expérience devrait inciter à mieux peser les effets de telles politiques. L’expérience récente d’un pays tel que l’Australie, où l’introduction du paquet neutre doublée d’une massive augmentation de prix n’a pas eu les effets escomptés, incite à penser que la lutte contre le tabagisme, que l’on peut soutenir au nom de la santé publique, n’est pas servie par de telles mesures. Plus près de nous, le cas de l’Allemagne, où les cigarettes sont accessibles à moindre coût qu’en France, et où le tabagisme recule, contrairement à la France, prouve également, pour reprendre l’aphorisme de Montesquieu, que les mœurs sont souvent plus fortes que la loi, même fiscale.
Au total, s’il n’est pas de taxation sans représentation, il n’est pas de démocratie qui fonctionne si la politique se résume à l’impôt.

Les Arvernes

Les Arvernes sont un groupe de hauts fonctionnaires, de professeurs, d’essayistes et d’entrepreneurs. Ils ont vocation à intervenir régulièrement, désormais, dans le débat public.
Composé de personnalités préférant rester anonymes, ce groupe se veut l'équivalent de droite aux Gracques qui s'étaient lancés lors de la campagne présidentielle de 2007 en signant un appel à une alliance PS-UDF. Les Arvernes, eux, souhaitent agir contre le déni de réalité dans lequel s'enferment trop souvent les élites françaises.





E) L'ordre de la dette - Enquête sur les infortunes de l’État et la prospérité du marché

Pourquoi la dette publique occupe-t-elle une telle place dans les débats économiques contemporains, en France et ailleurs ? Comment s’est-elle imposée comme la contrainte suprême qui justifie toutes les politiques d’austérité budgétaire et qui place les États sous surveillance des agences de notation ?
À rebours de ceux qui voient la dette comme une fatalité et une loi d’airain quasi naturelle, Benjamin Lemoine raconte dans ce livre comment, en France, l’« ordre de la dette » a été voulu, construit et organisé par des hommes politiques, des hauts fonctionnaires et des banquiers, de gauche comme de droite – parmi lesquels François Bloch-Lainé, Charles de Gaulle, Antoine Pinay, Valéry Giscard d’Estaing, Michel Pébereau, Laurent Fabius, Lionel Jospin, Dominique Strauss-Kahn… Autrement dit, il fut le fruit d’un choix politique.
Ce livre reconstitue la généalogie détaillée de ce choix stratégique, et prend la mesure de la grande transformation de l’État dans l’après-guerre. On réalise alors à quel point les nouveaux rapports entre finance privée et finances publiques sont au cœur des mutations du capitalisme, dans lequel l’État est devenu un acteur de marché comme les autres, qui crée et vend ses produits de dette, construisant par là sa propre prison.

« Ce qui est mis en cause dans ce livre, c’est l’évidence même de la dette. » André Orléan.

Version papier : 22 €
Version numérique : 14,99 €
Préface. Le résultat d’une volonté délibérée, par André Orléan
Introduction. Une histoire oubliée
I / Une histoire à (re)prendre : la mise en marché de la dette
1. Quand l’État a l’avantage : de la possibilité d’un financement hors marché
Couvrir autrement le déficit
Circuit du Trésor et marquage public de l’argent
Un prince de la République
Les banques sous contrainte
L’État, au-dessus du marché
Transgression avec l’orthodoxie et menace inflationniste
Le rappel à l’ordre monétaire
L’adoption du modèle britannique : le marché en rémission du « péché monétaire »
L’arrivée de Valéry Giscard d’Estaing
Un tremblement de terre : au nom de la démocratie des marchés
Un point de non-retour
2. La gauche au pouvoir se plie à l’ordre de la dette
Stopper la « ruine » de l’épargnant : donner aux investisseurs plutôt que les « frapper »
La relance Chirac
L’orthodoxie de Raymond Barre
L’inconcevable réhabilitation des finances publiques « actives »
Renoncer définitivement à la tentation monétaire
« Une saison en enfer »
« Merci de m’aider à comprendre »
« Une France qui vit au-dessus de ses moyens »
Pierre Bérégovoy : plus royaliste que le roi
« Ce système-là, on va le casser »
Interpréter l’extinction d’un régime économique : « préhistoire » de la modernité financière ou expérience critique ?
3. La nourriture terrestre dont les marchés ont besoin
Sur le modèle américain
Les dealers de proximité
Mise en scène du « sacrifice » et gains durables des banques
Lier les mains de l’État et rendre impossible tout retour en arrière
Quand Fabius créée une agence « à la française »
La police des conduites administratives
Les obligations DSK : le Trésor parie sur la désinflation
L’autodiscipline de l’État
II / La dette entre dans le débat public
4. Discipliner les États : le rôle de l’Europe
Une « numérologie arbitraire » ?
Opération Juppé : l’« affaire » France Télécom
Derrière le cas France Télécom, l’enjeu des retraites
Les gardiens du temple comptable contre l’« opportunisme » des États
Obtenir les meilleures statistiques possibles
Jospin : le « faux rebelle »
La discipline « brute » de la dette : pleins feux sur les passifs de l’État
L’enjeu des retraites : quand on tire le fil, tout vient
L’éclosion d’un nouvel acteur : les générations futures
5. Le rapport Pébereau : coup médiatique et pédagogie économique
Briser un tabou
Trouble dans les rangs des experts
La contre-offensive des keynésiens
« Il n’y a pas d’alternative »
Quand le ministre en fait un peu trop...
La chasse gardée du Trésor
6. La présidentielle de 2007 verrouillée ?
Une évaluation « objective »
Un « déconomètre »
Bayrou se fond dans le script de la dette
Une version dégradée du débat politique ?
La mise en scène de l’héroïsme présidentiel
Le « keynésianisme » de la dépense fiscale
François Fillon : « à la tête d’un État en faillite »
7. Et si toutes les dettes se valaient ?
Sauver les banques
Traquer l’État derrière la forme juridique
L’invention de la dette nette
L’« inéluctable » baisse des retraites
L’ordre politique des agences de notation
L’implacable « acceptation sociale »
L’obturation de l’avenir
La dette financière contre la dette sociale
Promesses de l’État et « lutte de classes »
Conclusion. Percer les boîtes noires de la dette
Politique de la (re-)structuration.
Lire un extrait en numérique ICI 

Benjamin LEMOINE est sociologue, chercheur au CNRS et à l’Institut de recherche interdisciplinaire en sciences sociales (IRISSO – université Paris-Dauphine). Sa thèse a été primée par l’Association française de science politique.





F) Du public au privé : le grand manège des hauts fonctionnaires

Alors que la campagne présidentielle est lancée, enquête sur les hauts fonctionnaires et les conseillers ministériels qui partent dans le privé, souvent dans la finance. 

Pantouflage, mode d’emploi

Un millier de fonctionnaires d’Etat par an sont concernés par le "pantouflage", c’est-à-dire par le fait de passer du secteur public au secteur privé. À l’origine, cette expression est utilisée par les Polytechniciens. Dans le jargon de Polytechnique, il y a ceux qui choisissent « la botte », c’est-à-dire le public, et ceux qui choisissent « la pantoufle », le secteur privé. Le « pantouflage » existe depuis longtemps, mais il s’est accéléré ces dernières années. Frédéric Lemaire, cofondateur du site Pantoufle watch peut citer une dizaine d'exemples de conseillers de l'Elysée partis vers le privé :
-Julien Pouget, conseiller économie de François Hollande, parti travailler pour Total
- Xavier Piechaczyk
, conseiller transport et environnement de François Hollande, a rejoint le directoire de RTE (Réseau de transport d’électricité), où il s’occupe des réseaux clients et des territoires
-David Kessler, ancien conseiller culture et communication, est parti travailler pour Orange studio
- Benoît Loutrel
, le numéro deux de l’ARCEP (Autorité de régulation des communications électroniques et des postes) recruté par Google France.
  • Les banques à l’Elysée
S’il y a bien un milieu que les hauts fonctionnaires affectionnent tout particulièrement, c’est celui de la finance. On peut citer le cas du directeur général de l’Agence des participations de l’Etat (APE), David Azéma recruté par l’une des plus grandes banques d’affaires américaines : Bank of America - Merryl Lynch. Ou encore, Jean-Jacques Barbéris, conseiller pour les affaires économiques de François Hollande. À peine nommé… déjà parti dans le privé : recruté par une société de gestion d’actifs liée au Crédit agricole et à la Société générale. Avant lui, ce poste de conseiller économique à l’Elysée était occupé par Laurence Boone (qui n’est pas haut fonctionnaire), passée par Barclays et Bank of America - Merril Lynch, avant de repartir en 2016 comme chef économiste pour la compagnie Axa.
  • Un phénomène structurel
Ce "pantouflage" concerne autant la droite que la gauche. Si on remonte dans le passé, on peut citer le cas de Gilles Grapinet, conseiller de Jean-Pierre Raffarin à Matignon, directeur de cabinet du ministre des Finances Thierry Breton, recruté par le Crédit agricole. Pierre Mariani est également concerné. Il était directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy au Budget, avant de rejoindre BNP-Paribas et de prendre la direction de la banque Dexia (qui a fait naufrage en 2011).
  • La valse des « Rétro pantouflages »
Le "pantouflage" fonctionne aussi dans l’autre sens. De plus en plus de hauts fonctionnaires partis dans le privé reviennent ensuite dans le public. C’est ce qu’on appelle le « rétro-pantouflage ». On parle également de « portes tournantes » (« revolving doors » en anglais) pour qualifier ces allers-retours incessants entre public et privé. L’un des cas les plus connus est celui du candidat à la présidence de la République, Emmanuel Macron, inspecteur des finances parti travailler dans la banque Rothschild, avant d’être nommé secrétaire adjoint de l’Elysée, puis ministre de l’Economie. On peut également citer Nicolas Namias, passé par la direction du Trésor, la Banque Populaire Caisse d’Epargne, il devient conseiller du Premier ministre Jean-Marc Ayrault. Puis il repart dans le privé, comme directeur de la stratégie de la banque d’affaire Natixis.
  • « Le pouvoir et l’argent »
Comment expliquer de tels allers-retours ? Il y a d’abord un contexte historique et économique qui a évolué en défaveur de l’Etat, analyse le sociologue Paul Lagneau-Ymonet
« Le rapport de force entre l’ordre économique et l’ordre politique a bougé en faveur de l’ordre économique. À l’échelle individuelle, les opportunités de carrière offertes à d’anciens hauts fonctionnaires dans le privé sont incomparables. Autrefois, vous pouviez décider de servir l’Etat parce que vous vouliez avoir le pouvoir, puis vous alliez dans le privé parce que vous vouliez l’argent. Aujourd’hui, vous pouvez avoir le beurre et l’argent du beurre, dans un temps très réduit. »
Ainsi, le salaire d’un haut fonctionnaire qui va « pantoufler » dans la banque peut être multiplié par dix, voire plus.
  • Un pantouflage encouragé par l’Etat
En théorie, un haut fonctionnaire sert l’Etat pendant dix ans, dont quatre juste après son diplôme, sous peine de rembourser « la pantoufle », c’est à dire une partie du coût de ses études payé par l’Etat. Mais dans la pratique, les délais pour "pantoufler" sont de plus en plus courts, spécifiquement pour certains corps de l’Etat, comme les Inspecteurs des Finances. Selon le sociologue François Denord,"les sorties vers le privé s'effectuent relativement tôt" et elles concernent également des cadres de Bercy, où le MS3P (Mission suivi personnalisé et parcours professionnel) s’occupe de recenser les offres de recrutement venues du privé :
"75 % des inspecteurs des finances vont pantoufler au cours de leur carrière, dont un bon tiers de manière durable ou définitive."
  • Un directeur du Trésor recruté par un fonds franco-chinois
Exemple spectaculaire de ces "pantouflages" encouragés par l’Etat : l’ancien directeur du Trésor, ex-directeur général des Finances publiques, Bruno Bézard, a été recruté par un fonds d’investissement franco-chinois, Cathay Capital. Son prédécesseur au Trésor, Ramon Fernandez, a lui été recruté par Orange.
  • « Un petit lutin » dans la tête des hauts fonctionnaires
Ces passerelles avec la finance finissent par déteindre sur l’état d’esprit de certains hauts fonctionnaires. C'est l'explication de Christophe Nijdam, ancien banquier et ex-secrétaire général de l’ONG Finance Watch :
« Quand vous êtes au Trésor, vous savez que si vous voulez par la suite faire une carrière mieux rémunérée, vous allez le faire dans le secteur bancaire. Vous avez toujours un petit lutin à l’arrière de votre cerveau qui vous dit que ce n’est peut-être pas très malin d’aller à l’encontre des désirs du secteur bancaire… au cas où. »
  • Un ancien de la Société Générale à Bercy
Autre exemple : la nomination, en juillet 2016, de Thierry Aulagnon, comme directeur de cabinet du ministre des Finances. Cet énarque, ancien du Trésor, a déjà dirigé le cabinet de Michel Sapin, au début des années 1990 avant d’être recruté par l’assureur Gan. Il a ensuite fait toute sa carrière à la Société Générale, puis, il est revenu à Bercy. Cette nomination pose question puisque les Finances sont en lien direct avec le secteur bancaire et les assurances. De plus, le gouvernement s'interroge sur la fiscalité accordée à la Société Générale dans l’affaire Kerviel.
Pour tenter de couper court aux critiques, Michel Sapin indique avoir consulté la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP) et avoir donné des consignes strictes pour éviter tout conflit d’intérêt. Thierry Aulagnon a l’interdiction de traiter certains dossiers, comme ceux de la Société Générale.
  • Permis de « pantoufler »
Ces pantouflages sont censés être encadrés par une Commission de la déontologie de la Fonction publique. Les avis de cette Commission ne sont pas publics mais un rapport est publié chaque année. Les fonctionnaires ont l’interdiction pendant trois ans d’aller travailler dans une entreprise avec laquelle ils ont eu un lien. La grande majorité des demandes de pantouflages sont validées par cette Commission de déontologie. Seuls 2% d’avis négatifs sont rendus. Selon Roland Peylet, président de la Commission de déontologie de la Fonction publique, la loi pénale est strictement appliquée :
« Bien sûr, il y a une marge d’appréciation. Il n’est pas toujours facile de se faire une opinion juste sur la part qu’a pu prendre un fonctionnaire dans une prise de décision concernant une entreprise. Des allers et venues sont non seulement possibles, mais à priori encouragées par le législateur, entre la fonction publique et l’exercice d’activités privées. Si le législateur prend une orientation contraire, nous ferons ce que veut le législateur. »
Plus de 50 % des autorisations de "pantoufler" sont assortis de conditions, émises par la Commission de déontologie. Par exemple, Bruno Bézard a obtenu le feu vert de la Commission à condition de ne pas avoir de contacts avec la direction du Trésor. Mais le contrôle de ces réserves reste difficile à appliquer.
  • L’affaire Pérol, symbole du « pantouflage » à la française
Dans l’affaire François Pérol, en 2009, la Commission de déontologie a été contournée. Cet ancien conseiller de Nicolas Sarkozy à l’Elysée, a accompagné la fusion de l’entité Banque Populaire Caisse d’épargne (BPCE) avant d’en prendre la direction. François Pérol a d'abord été directeur de cabinet adjoint de Francis Mer puis de Nicolas Sarkozy, à Bercy, en charge de la création d’une filiale des Caisses d’épargne. Il a par la suite conseillé la banque Rothschild à ce sujet. Jérôme Karsenti, avocat de l’association Anticor résume l'affaire :
On reproche à François Pérol d’avoir préparé le fauteuil dans lequel il s’est assis par la suite.
Poursuivi pour « prise illégale d’intérêt », François Pérol a été relaxé en première instance. Son procès en appel doit se tenir en mars 2017.

« Ce qui est bon pour la banque est bon pour la France »

L’actuel secrétaire général de l’Elysée, Jean-Pierre Jouyet, est un bon exemple de ces pantouflages : il a successivement été directeur adjoint de cabinet de Lionel Jospin, directeur du Trésor, président de Barclays-France, secrétaire d’Etat aux affaires européennes, dans le gouvernement de François Fillon, président de l’Autorité des marchés financiers, puis directeur général de la Caisse des dépôts et consignations… Agnès Rousseaux, journaliste au site Basta !, s'interroge :
« Comment quelqu’un qui a fait des allers-retours entre le secteur privé et le secteur public, qui a travaillé dans le secteur financier, peut être nommé dans l’instance de régulation du secteur bancaire ? »
  • Une fausse loi bancaire
La loi dite de séparation bancaire en juillet 2013 reste très timide. Elle ne sépare pas réellement les activités spéculatives des banques, des activités de crédit. Thierry Philipponnat, directeur du think tank Institut Friedland, ancien secrétaire général de l’ONG Finance Watch considère que le lobby bancaire pèse sur le législateur :
« Cette loi bancaire a été adoptée parce que les responsables des grandes institutions financières ont convaincu ceux qui avaient le pouvoir politique que ce texte devait avoir l’apparence de la réforme. Mais en réalité, cette loi n’a pas changé grand-chose… »
  • « Circulez, il n’y a rien à voir ! »
L’actuelle directrice générale de la Fédération bancaire française, Marie-Anne Barbat-Layani connait bien les rouages de l’Etat. Inspectrice des Finances, passée par le Trésor, elle a conseillé le ministre PS des Finances Christian Sauter, avant de retourner dans le privé, comme directrice générale adjointe de la Fédération nationale du Crédit agricole. En 2010, elle est nommé directrice adjointe du cabinet du Premier ministre François Fillon, avant de défendre aujourd’hui les banques françaises. L'ancien banquier et ex-secrétaire général de Finance Watch, Christophe Nijdam, explique :
« Il y a une sorte de verrouillage et d’endogamie qui bloque ou de limite la régulation bancaire. On se comprend, on parle le même langage. Nous sommes des experts. On va présenter des intérêts comme étant dans l’intérêt général. Circulez, il n’y a rien à voir ! »
  • Sous l’influence de la finance ?
La nomination du gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, par François Hollande, en septembre 2015, a été très critiquée par de nombreux observateurs. Polytechnicien, inspecteur des finances, énarque, il a été directeur de cabinet de Dominique Strauss-Kahn, à Bercy, puis directeur délégué de la banque BNP-Paribas, avant d’être nommé à la tête de la Banque de France. Pour Jézabel Couppey-Soubeyran, maître de conférence à Paris 1 Panthéon-Sorbonne, cela pose problème :
« Quelle voix est portée ? C’est nécessairement une voix influencée par la culture acquise dans le secteur bancaire et financier. »
Entendu le 29 septembre 2015, devant la commission des Finances de l’Assemblée nationale, François Villeroy de Galhau a assuré qu’il assumerait sa mission en toute indépendance :
« J’ai lu parfois que je risquais d’être prisonnier de la finance si j’étais nommé. C’est extrêmement mal me connaître. Je suis un homme libre, un homme droit et donc je déciderai seulement en fonction de ce que je crois être bon pour notre pays et son économie. »
Mais s’agit-il vraiment d’une question de personne ? Les questions posées par cette nomination renvoient plutôt à la façon dont l’Etat considère l’oligopole bancaire. Pour Michel Crinetz, ancien superviseur financier, le problème est "plus structurel que personnel" :
"On ne soupçonne pas le gouverneur de la Banque de France de défendre les intérêts de BNP-Paribas. Il va défendre les intérêts des banques, en général, au lieu de les superviser. Il considère qu’il est là pour favoriser les champions nationaux, que ce qui est bon pour la BNP ou pour la Société générale est bon pour la France. Il ne faut surtout pas les critiquer, ni les sanctionner."
Un rapport confidentiel de l’OCDE daté de 2009, fait le même constat en Australie, en Belgique, au Canada, en Irlande, en Nouvelle-Zélande, et au Royaume-Uni. Là encore, l’OCDE s’inquiète des conséquences du pantouflage et des « portes tournantes » sur les autorités de régulation.
Extrait du rapport de l'OCDE en 2009 :
« Les relations proches entre, d’un côté, les régulateurs et le pouvoir politique, et de l’autre, l’industrie de la finance et ses lobbyistes, sont alimentées par le recyclage régulier de personnel entre ces deux univers. (…) S’attaquer aux portes tournantes constitue le début d’un processus indispensable afin de restaurer la confiance des citoyens dans le système politique et le fonctionnement des marchés financiers. »

La Commission européenne, royaume des « portes tournantes »

Ce système des portes tournantes entre politiques et secteur financier se retrouve également à l’échelle européenne. On a pu le constater, en septembre 2016, lorsque l’ancien président de la Commission européenne (2004-2014), Manuel Barroso a été recruté par la banque Goldman Sachs.
  • Une pétition des fonctionnaires européens
Ce recrutement de Manuel Barroso par Goldman Sachs a provoqué une onde de choc. Une pétition lancée par des fonctionnaires européens a recueillie plus de 150 000 signatures. Un porte-parole des fonctionnaires européens, qui tient à rester anonyme, explique son sentiment de trahison et la nécessité de réagir :
« Nous avons l’impression d’avoir été trahis de voir que ce président de la Commission pour qui nous avons travaillé, rejoigne une banque impliquée dans le scandale des subprimes, et qui a aidé la Grèce à maquiller ses comptes et à spéculer sur ses malversations. »
Selon les règles de l’Union européenne, ce pantouflage de Manuel Barroso n’a pourtant rien d’illégal. En effet, les commissaires européens doivent respecter un délai de 18 mois avant de "pantoufler" dans le privé. C’est ce qu’a fait Manuel Barroso. La Commission européenne propose désormais de faire passer ce délai à deux ans, trois ans pour les anciens présidents. Pour les députés européens, en revanche, il n’y a aucun délai légal pour "pantoufler", alors que leurs collaborateurs, eux, doivent respecter une période de deux ans.
  • Un comité d’éthique pas vraiment indépendant
Un comité d’éthique peut se prononcer sur ces "pantouflages". Mais ses avis ne sont pas contraignants. L’article 245 du traité de l’Union européenne prévoit seulement « un devoir d’honnêteté et de délicatesse de la part des commissaires dans l’acceptation de fonction, à l’issue de leur mandat. » Ce comité d’éthique, nommé par le collège des commissaires européen, n’est pas vraiment indépendant. Il est composé de trois membres : un ancien juge néerlandais à la Cour de justice de l’Union européenne, un social-démocrate allemand, ex-membre du Parlement européen, et un ancien haut responsable autrichien à la Commission. Dans le cas de Manuel Barroso, le comité d’éthique a conclu qu’il y avait « sans doute, un manque de jugement » de la part de l’ex-président de la Commission européenne, mais « pas d’infraction ».
  • Une enquête sur le pantouflage de Barroso
Une plainte a été déposée par le collectif d’employés des institutions européennes à l’origine de la pétition auprès du médiateur européen, l’irlandaise Emily O’Reilly :
« Je vais faire une enquête. Je vais interroger la Commission et le comité d’éthique. J’ai le pouvoir d’examiner n’importe quel document qui puisse m’aider dans ma réflexion. Puis, je ferai des recommandations. »
Le médiateur européen n’a pas de pouvoir de sanction, mais il peut mener des investigations et faire des propositions de réformes.
  • Goldman Sachs cible « le vrai pouvoir »
Une autre enquête est actuellement menée par la médiatrice. Elle concerne, cette fois, les liens entre le président de la Banque centrale européenne (BCE), Mario Draghi, et le Groupe des Trente, un cercle de banquiers et de financiers. Mario Draghi a, lui aussi, travaillé pour Goldman Sachs, tout comme Peter Sutherland, un ancien commissaire à la concurrence, directeur général de l’Organisation mondial du commerce, devenu président de Goldman Sachs de 2005 à 2015.
  • Bruxelles, temple du lobbying
À Bruxelles, 15 000 lobbyistes sont à l’œuvre. Des commissaires européens sont ainsi régulièrement recrutés par des entreprises avec lesquelles ils sont en contact. C’est le cas de la néerlandaise Nelly Kroes, ancienne commissaire à la concurrence et à l’Economie numérique, embauché par Bank of America - Merryl Lynch et par la société Uber. On retrouve son nom dans l’affaire des Bahamas Leaks, par le biais d’une société off-shore qu’elle dirigeait. Autre exemple : l’ex-commissaire européenne au climat, et ancienne ministre de l’énergie danoise, Connie Hedegaard, recrutée… par Volkswagen.
  • La tactique des « ouvreurs de porte »
Tous ces pantouflages sont suivis de près à Bruxelles, par l’ONG, Europe Corporate Observatory. Pour Martin Pigeon, porte-parole de Europe Corporate Observatory, "ces anciens commissaires sont des ouvreurs de porte" :
"Il est très difficile de leur refuser un rendez-vous, parce qu’ils ciblent leurs anciens subordonnées."
C’est ce qu’a fait, par exemple, l’ancien commissaire au marché intérieur, l’irlandais Charlie Mc Creevy pour le compte de la compagnie aérienne Ryanair. Alors qu’il était responsable de la régulation bancaire, Charlie Mc Creevy a également rejoint le conseil d’administration d’une banque.
  • 50 % des ex-commissaires devenus lobbyistes
Un rapport publié par l’ONG Transparency International permet de prendre la mesure de l’importance de ces pantouflages européens. 30 % des anciens députés du parlement européen travaillent pour des organisations inscrites au registre des lobbyistes de l’Union européenne. Plus de 50 % des ex commissaires européens sont devenus lobbyistes. Daniel Freund, responsable de Transparency International en Belgique, donne un exemple :
« L’ancienne présidente de la Commission des affaires financières économiques a rejoint la Bourse londonienne. Au bout de quelques semaines, des responsables européens quittent leurs fonctions pour des agences de lobbying. »
  • Une régulation européenne torpillée par le lobby bancaire
Comme en France, ces pantouflages ont donc un impact direct sur la régulation bancaire. Ainsi, lorsque Michel Barnier, le commissaire européen chargé des services financiers et du marché intérieur, a tenté d’imposer des règles plus strictes pour les activités à risque des banques, il s’est heurté à un mur. Le gouverneur de la Banque de France, à l’époque, Christian Noyer, a clairement désavoué la volonté de régulation du commissaire Barnier :
« Les idées qui ont été mises sur la table par le commissaire Barnier sont, je pèse mes mots, irresponsables et contraires aux intérêts de l'économie européenne. J’espère que ce projet restera enterré et qu'il n'aura aucune suite. »
Une quarantaine de texte a finalement été adopté mais sur l’essentiel, Michel Barnier n’a pas été suivi. Jean-Michel Naulot, ancien banquier, ex-régulateur à l’Autorité des marchés financiers appelle cela "le temps des lobbys" :
"Aux Etats-Unis, le président Obama avait demandé au secrétaire au Trésor Paul Volcker de réformer les banques. On est passé d’un texte de 39 pages… à 950 pages ! Les textes sont dénaturés. Michel Barnier avait fait un excellent travail. Mais on en a fait des confettis."
Le britannique Jonathan Hill a succédé à Michel Barnier en 2014. Il était auparavant lobbyiste pour le milieu bancaire…
  • Des « experts » proches de la banque
Après la crise financière de 2007-2008, le président de la Commission européenne, Manuel Barroso a fait appel à un groupe d’ « experts » pour rendre un rapport censé réformer « la supervision financière ». Mais la plupart de ces « experts » étaient liés au secteur bancaire (Citygroupe, Morgan Stanley, BNP-Paribas…). Jacques de Larosière, ancien directeur général du Fonds monétaire international (FMI), ex-gouverneur de la Banque de France, conseiller de la banque BNP-Paribas et auteur d’un rapport sur la régulation et la supervision des banque, se souvient :
« Lorsque Monsieur Barroso m’a appelé, j’avais officiellement quitté BNP-Paribas la veille. J’ai accepté de me remettre au travail. Mais je l’ai fait avec la considération de l’intérêt public. Je n’ai pas regardé si c’était intéressant pour BNP, cette idée ne m’a même pas effleuré… »
  • Une « capture intellectuelle »
Outre « l’expertise », l’autre argument avancé par le lobby bancaire est celui d’une régulation qui serait préjudiciable à l’activité économique. Selon Sébastien de Brouwer, porte-parole de la Fédération européenne des banques, "les institutions européennes doivent connaitre l’impact des décisions qu’elles prennent" :
Pour connaitre cet impact, elles ont besoin d’être informés par des experts. C’est le rôle que nous jouons. Nous sommes attentifs à l’impact de ces décisions sur le financement de l’économie."
  • Ne pas mordre la main qui pourrait te nourrir…
Au sein du Parlement européen, certains députés tentent de résister à cette « capture intellectuelle », comme par exemple Philippe Lamberts, eurodéputé Vert belge :
Il ne faut pas venir me raconter des salades !
« Le travail de lobbyistes financiers n’est pas très difficile, parce que bien souvent avec des arguments bateaux, ils parviennent à emporter le morceau. J’ai passé 22 ans dans le secteur privé, dans une multinationale américaine, j’ai constaté les ravages de la financiarisation. Malheureusement, la plupart des décideurs politiques n’ont aucune expérience de terrain. Ou alors, ils ne veulent pas mordre la main qui pourrait un jour les nourrir. »
  • Une administration Goldman Sachs
Aux Etats-Unis, ces pantouflages ont pris une ampleur considérable. De nombreux anciens membres de Goldman Sachs se retrouvent à des postes clés de l’administration du président américain Donald Trump. C'est le cas du conseiller du président, Steve Bannon ou du secrétaire au Trésor américain, Steven Mnuchin. Conséquence : Donald Trump vient d’annuler toute une série de régulations bancaires. Les « portes tournantes » sont désormais bien dans toutes les têtes.

►► Retrouvez toutes les émissions de Secrets d'Info en cliquant ici.
Références bibliographiques :

 Source





G) Concurrence à deux niveaux: mettre un terme aux oligopoles

Comment obtenir des marchés concurrentiels quand les entreprises qui y vendent un bien final maîtrisent aussi les facteurs de production (comme c'est le cas avec les poids lourds de la téléphonie mobile en France) ? Pour Johan Hombert et ses co-auteurs, la solution ne peut pas se résumer à forcer les firmes intégrées à fournir les facteurs de production à d'autres firmes isolées.

Johan Hombert et ses co-auteurs se sont intéressés à la concurrence sur les marchés où les firmes sont intégrées verticalement : elles produisent à la fois le facteur de production – le réseau qu'elles possèdent dans le cas de la téléphonie mobile – et le bien final – les forfaits qu'elles proposent. “Nous avions en tête l'industrie des télécoms quand nous avons commencé ce travail, autour de 2007, au moment où l'Internet à haut débit se développait en France, car il y avait beaucoup de questions de régulation et de politique de la concurrence qui se posaient : comment faire pour développer les télécoms et pour que les prix ne soient pas trop élevés pour le consommateur final ?, explique Johan Hombert. À l'époque et encore maintenant, ce marché était vraiment oligopolistique car il y a très peu d'acteurs. Mais cela peut s'appliquer à de nombreuses autres industries.

ENCOURAGER LES NOUVEAUX ENTRANTS : INSUFFISANT !

Le secteur qui illustre le mieux cette recherche reste celui de la téléphonie mobile en France : avant l'arrivée de Free fin 2011, il existait trois opérateurs qui possédaient une infrastructure de réseau et des licences de téléphonie mobile – SFR, Bouygues Telecom et Orange. “Ce que voulait faire le régulateur depuis plusieurs années, et la Commission européenne a aussi beaucoup poussé dans cette direction, c'est d'avoir plus de concurrents. Mais l'entrée sur ce type de marchés est très coûteuse car il faut développer une nouvelle infrastructure de réseau, mettre des antennes… L'idée du régulateur a donc été de faire entrer de nouvelles firmes sans leur demander de construire leur propre réseau. Il s'agissait de forcer les opérateurs existants à sous-louer leur réseau à ces nouveaux entrants et donc de créer de la concurrence sans investissements.” Ainsi sont nés les MVNO (pour Mobile Virtual Network Operators) comme Virgin Mobile, Auchan ou Budget.

COMPRENDRE LA PERSISTANCE DES OLIGOPOLES
Les travaux de Johan Hombert et de ses coauteurs montrent néanmoins que cette solution n'aboutit pas à une concurrence digne de ce nom. “Les opérateurs existants ont peu d'incitations à aider leurs concurrents à produire des biens qui vont concurrencer les leurs”, estime-t-il. Les firmes intégrées verticalement tirent leurs profits de deux sources : en vendant des forfaits à leurs clients finaux, mais aussi en sous-louant une partie de leur réseau aux MVNO. “Il va donc y avoir une tension en permanence : d'un côté, elles vont avoir envie de baisser les prix sur les forfaits pour capturer plus de parts de marché ; mais en faisant cela, elles vont tuer les MVNO et réduire leur autre source de profit.

Les opérateurs ont peu d'incitations à aider leurs concurrents à produire des biens qui vont concurrencer les leurs.


Elles peuvent également essayer de faire beaucoup de profits en sous-louant leur réseau à un maximum de concurrents, mais ce faisant elles augmentent la concurrence sur le marché des forfaits et réduisent leur profit de ce côté. En fait, à chaque fois qu'une firme intégrée veut être un peu plus agressive sur l'un des deux marchés, elle impacte négativement son autre source de profit. Au final, elles n'ont envie de faire baisser les prix sur aucun de ces deux marchés.” Cela explique que la grosse trentaine de MVNO français n'est jamais parvenue à capter plus de 6-7% de parts de marché…

ACCROITRE LA CONCURRENCE

Quelles sont les solutions alternatives ? La plus brutale consiste à imposer aux opérateurs mobiles le prix de location du réseau aux MVNO. “C'est très difficile à mettre en place dans la téléphonie mobile car le régulateur subit des pressions importantes de la part des gros opérateurs”, explique Johan Hombert. Il est aussi possible de plafonner les prix: ni trop bas pour ne pas décourager l'investissement, ni trop haut pour permettre aux MVNO d'entrer sur le marché. “C'est également difficile car le régulateur ne connaît pas bien les coûts de maintenance, d'entretien et de développement des réseaux, ce qui rend sa tâche plus compliquée.” Une troisième solution consiste à forcer des structures intégrées à se séparer en deux, comme cela a été fait dans d'autres industries et notamment le rail, puisque Réseau Ferré de France loue ses rails à la SNCF et à d'autres sociétés. “La SNCF n'aurait jamais accepté de louer son réseau à des concurrents, ou alors à des tarifs très élevés, poursuit Johan Hombert. Et c'est encore plus compliqué dans la téléphonie mobile : il y a plus de synergies entre la vente de forfaits et l'opération de réseaux.” Dernière solution, et c'est précisément celle qui a été retenue sur ce marché : l'arrivée d'un nouveau concurrent qui possède une infrastructure de réseau, même réduite. Car s'il loue une partie de son réseau à Orange, Free couvre d'après Johan Hombert une grande partie du territoire avec son propre réseau, contre 0 % pour les MVNO. “On est en train de voir que les prix, qui se situaient à un niveau très stable, se sont effondrés brutalement, se réjouit-il. Ce qui se passe confirme les prédictions de notre modèle : seule la présence d'un opérateur qui n'est pas totalement dépendant de ses concurrents crée une vraie situation de concurrence sur le marché.”

D'après une interview de Johan Hombert, professeur de finance, et l'article “Upsteam competition with vertically integrated firms” (Journal of Industrial Economics , vol. 59, No 4, décembre 2011, pp 677-713), coécrit avec Marc Bourreau, Jérôme Pouyet et Nicolas Schutz.







H) L’impôt, c’est le vol

La notion de justice fiscale est une illusion

Monsieur Macron n’échappe pas au rituel : les augmentations d’impôts sont pour tout de suite, les baisses pour plus tard ou… pour les calendes grecques. Et comme à chaque fois qu’il est question d’impôt, les avis contradictoires sur la notion de justice fiscale fusent.
« L’impôt progressif est juste parce qu’il frappe plus les riches ». « Mais non, c’est la flat tax qui est juste, parce qu’elle frappe tout le monde de la même façon… » De même pour la TVA, « injuste parce qu’elle frappe identiquement le riche et le pauvre ». « Oui mais le riche dépense plus, et achète des choses plus chères, donc il en paye plus… »

Débats moraux stériles

Ces débats moraux sont parfaitement stériles, parce que l’impôt vous prenant votre argent contre votre volonté, il s’agit donc d’un vol. Légal sans doute, mais un vol quand même. Et comme il n’y a pas de façon éthique de voler, toute tentative de justification morale est vaine. Les arguments ne peuvent être qu’idéologiques, et donc politiques.
C’est comme si on demandait à quelqu’un quelle est la meilleure façon de tuer sa mère : la seule réponse morale est que « il ne faut pas tuer sa mère… » Les scénaristes ne s’y trompent d’ailleurs pas. Dans les films qui commencent par un hold-up, et se poursuivent par une lutte pour le magot entre les voleurs, les billets finissent généralement dans un incendie, une rivière en crue ou ventilés par les pales d’un hélicoptère ! Parce qu’il n’y a pas plus de façon morale de s’attribuer le produit d’un vol, que de le voler…

Morale et taxe

Cela compris, on peut discuter de la façon la plus intelligente de taxer, de celle qui ne pousse pas certains à s’exiler, qui décourage le moins la production de richesses, qui tond sans arracher la peau, qui ne force pas à liquider une entreprise quand son patron meurt, etc. ; mais la morale n’a rien à voir là-dedans.
Enfin on peut se demander si au-delà de police, justice, armée et diplomatie, les hommes de l’État ont légitimité pour redistribuer les fruits de notre travail et de notre épargne à une myriades d’autres activités. C’est sans doute la question la plus fondamentale. C’est probablement pour cela qu’on ne l’aborde jamais…

Richard Hanlet

Quelques exemples ci-dessous:


75 articles correspondent à votre recherche.

L'épisode du vase de Soissons est révélateur des fondements du droit en France, si différent du droit anglo-saxon : le roi est au-dessus des lois.

par François-René Rideau 

I) Loi travail : analyse d’un little Bang
Le 31 août 2017, le gouvernement a présenté après 3 mois de concertation, les 5 ordonnances visant à réformer le droit du travail. Après avoir évalué le projet d’habilitation desdites ordonnances en juillet dernier, les experts de la Fondation Concorde se penchent cette fois sur le projet final.
Cette loi, que certains appellent la « Loi Travail XXL », présente deux atouts par rapport aux précédentes tentatives de réforme du marché du travail :
  • Le choix prépondérant des TPE – PME, poumons de notre économie et pourtant les grandes oubliées des précédentes réformes qui privilégiaient les grandes entreprises.
  • Le choix de la simplification administrative. Les entrepreneurs de PME et TPE l’appelaient de leurs vœux, cette simplification leur permettra de se recentrer vers leur activité économique, sans que les tâches administratives et le risque d’erreur soient chronophages.
 
Loin du coup d'Etat social annoncé par certains, cette loi a donc le mérite de mettre les petites et moyennes entreprises au coeur du processus de simplification et de flexibilisation de notre marché du travail. Elles disposeront de mesures simplifiées, plus visibles et ce sans que les droits des salariés ne soient pénalisés. Ces 5 ordonnances permettent également de prévoir les mutations inhérentes au marché du travail, en permettant une meilleure prise en compte de la pénibilité des tâches et en développant enfin de nouvelles pratiques comme le télétravail. 
 
 
Synthèse de l'analyse des experts de la Fondation Concorde
 
Mesures positives :
 
  • Encadrement des indemnités prud’homales et raccourcissement des délais de recours.
  • Décentralisation du dialogue social au sein des entreprises de moins de 50 salariés.
  • Référendum à l’initiative des employeurs, pour les accords minoritaires dans les entreprises de plus de 50 salariés
  • Fusion des 3 instances au sein du CSE.
  • Limitation du nombre de mandats syndicaux.
  • Libre détermination de la périodicité et du contenu des consultations obligatoires
  • Assouplissement des règles en matière d’accords d’entreprise défensifs.
  • Assouplissement des règles en matière de licenciements économiques collectifs (motif et reclassement)
  • Création de la « ruptures conventionnelle collective »
  • Disparition du chèque syndical.
  • Accélération de la fusion des branches professionnelles
  • Sécurisation des accords collectifs : présomption de conformité à loi, action en nullité et effet rétroactif de la nullité encadrée  
  • Simplification des démarches et formalités administratives.
  • Encadrement incitatif au recours au télétravail.
 
Mesures négatives :
 
  • Non remise en cause du monopole syndical au premier tour des élections professionnelles.
  • Ouvertures vers la cogestion des entreprises.
  • Maintien du principe de prise en charge par l’employeur des frais d’expertises diligentées par les représentants du personnel.
  • Fusion des instances mais aucune rationalisation n’est prévue à ce stade
  • Maintien du caractère repoussoir des seuils d’effectifs (11 et 50 salariés)
  • Possibilité de demander la reconnaissance d’une unité économique et sociale à partir de 11 salariés et non plus 50
  • Non relèvement des seuils en matière de licenciements collectifs
  • Un barème des indemnités prud’homales qui ne fait que reprendre le barème indicatif de la loi El Khomri
  • Augmentation annoncée des indemnités de licenciement légales
  • Prépondérance du pouvoir de la branche sur l’entreprise en ce qui concerne les modalités de recours aux CDD et aux CDI de chantier.
 
Analyse du projet final des ordonnances portant réforme du marché du travail
 
Introduction
Le 31 août 2017, le gouvernement a présenté après 3 mois de concertation, les 5 ordonnances visant à réformer le droit du travail. Après avoir évalué le projet d’habilitation desdites ordonnances en juillet dernier, les experts de la Fondation Concorde se penchent cette fois sur le projet final.
Cette loi, que certains appellent la « Loi Travail XXL », présente deux atouts par rapport aux précédentes tentatives de réforme du marché du travail :
Le choix prépondérant des TPE PME, poumons de notre économie et pourtant les grandes oubliées des précédentes réformes qui privilégiaient les grandes entreprises.
Le choix de la simplification administrative. Les entrepreneurs de PME et TPE l’appelaient de leurs vœux, cette simplification leur permettra de se recentrer vers leur activité économique, sans que les tâches administratives et le risque d’erreur soient chronophages. 

Synthèse
Mesures positives :
  • ➢  Encadrement des indemnités prud’homales et raccourcissement des délais de recours.
  • ➢  Décentralisation du dialogue social au sein des entreprises de moins de 50 salariés.
    ➢Référendum à l’initiative des employeurs, pour les accords minoritaires dans les entreprises de plus de 50 salariés
  • ➢  Fusion des 3 instances au sein du CSE.
  • ➢  Limitation du nombre de mandats syndicaux.
    ➢Libre détermination de la périodicité et du contenu des consultations obligatoires
    ➢Assouplissement des règles en matière d’accords d’entreprise défensifs.
    ➢Assouplissement des règles en matière de licenciements économiques collectifs (motif et reclassement)
  • ➢  Création de la « ruptures conventionnelle collective »
  • ➢  Disparition du chèque syndical.
  • ➢  Accélération de la fusion des branches professionnelles
  • ➢  Sécurisation des accords collectifs : présomption de conformité à loi, action en nullité et effet rétroactif de la nullité encadrée
  • ➢  Simplification des démarches et formalités administratives.
  • ➢  Encadrement incitatif au recours au télétravail.
Mesures négatives :
➢Non remise en cause du monopole syndical au premier tour des élections professionnelles.
  • ➢  Ouvertures vers la cogestion des entreprises.
  • ➢  Maintien du principe de prise en charge par l’employeur des frais
    d’expertises diligentées par les représentants du personnel.
  • ➢  Fusion des instances mais aucune rationalisation n’est prévue à ce stade
    ➢Maintien du caractère repoussoir des seuils d’effectifs (11 et 50 salariés)
  • ➢  Possibilité de demander la reconnaissance d’une unité économique et sociale à partir de 11 salariés et non plus 50
  • ➢  Non relèvement des seuils en matière de licenciements collectifs
  • ➢  Un barème des indemnités prud’homales qui ne fait que reprendre
    le barème indicatif de la loi El Khomri
  • ➢  Augmentation annoncée des indemnités de licenciement légales
  • ➢  Prépondérance du pouvoir de la branche sur l’entreprise en ce qui concerne les modalités de recours aux CDD et aux CDI de chantier.
Un dialogue social ouvert et sécurisé
Mesures :
Une négociation simple et accessible pour les entreprises de moins de 50salariés, grâce à la possibilité de négocier directement avec un élu du personnel sur tous les sujets.
  • ➢  La possibilité, dans toutes les entreprises de moins de 20 salariés qui n’ont pas d’élu du personnel, de négocier directement avec ses salariés sur tous les sujets.
  • ➢  La possibilité pour le chef d’entreprise des entreprises de plus de 50 salariés de prendre l’initiative du référendum pour entériner un accord signé avec un syndicat minoritaire (entre 30 et 50% des suffrages)
    Notre avis :
    «Dans les entreprises dont l’effectif habituel est compris entre onze et moins de cinquante salariés, en l’absence de délégué syndical dans l’entreprise ou l’établissement, les accords d'entreprise ou d'établissement peuvent être négociés, conclus et révisés : « 1° Soit par un ou plusieurs salariés expressément mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives dans la branche ou, à défaut, par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives au niveau national et interprofessionnel, étant membres ou non de la délégation du personnel du comité social et économique. A cet effet, une même organisation ne peut mandater qu’un seul salarié. « 2° Soit par un ou des membres de la délégation du personnel du comité social et économique.
    « Les accords ainsi négociés et conclus peuvent porter sur toutes les mesures qui peuvent être négociées par accord d’entreprise ou d’établissement sur le fondement du présent code. »
    Mesure phare annoncée durant la campagne présidentielle, la décentralisation du dialogue social est une excellente chose, tant elle permet d’adapter la norme sociale à la variété des entreprises et de leurs secteurs d’activité.
    Ainsi, les salariés et leurs employeurs pourront convenir ensemble de dispositions relatives à l’organisation de leurs conditions de travail, afin de gagner en souplesse et en rapidité, sans que la branche ne prime sur l’accord global, y compris pour les accords de branche conclus avant la loi du 4 mai 2004
    La possibilité de négocier TOUS les sujets, permet aux partenaires sociaux dans l’entreprise le souhaitant d’ajuster leurs temps de travail à la baisse ou à la hausse à leur guise, de négocier toutes leurs conditions de travail, y compris le système de primes, pour mieux s’adapter aux exigences de leur marché.
• Un dialogue social sécurisé par (i) la présomption de légalité, (ii) le raccourcissement des délais de prescription des actions en nullité à 2 mois et (iii) la possibilité offerte au juge de moduler les effets de l’annulation d’un accord collectif
« Les conventions et accords collectifs répondant aux règles de validité applicables à la date de conclusion sont présumées négociés et conclus conformément à la loi.
Il appartient à celui qui conteste la validité d’une convention ou d’un accord collectif ou le déroulement de la négociation d’apporter la preuve que la convention ou l’accord n’a pas été négocié ou conclu conformément à la loi sauf dispositions légales contraires ».
« Toute action en nullité doit (...) à peine d’irrecevabilité, être engagée avant l’expiration d’un délai de deux mois »
« En cas d’annulation judiciaire de tout ou partie d’un accord ou d’une convention collective, le juge peut décider s’il apparait que l’effet rétroactif de cette annulation est de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu’il était en vigueur que de l’intérêt général pouvant s’attacher à un maintien temporaire de ses effets, que l’annulation ne produira ses effets que pour l’avenir ou de moduler les effets de sa décision dans le temps, sans préjudice des actions contentieuses déjà engagées à la date de sa décision sur le même fondement. »
De la sorte, les accords collectifs -parmi lesquels les accords d’entreprises- deviennent plus faciles à conclure et sécurisés pour l’avenir. Mais cette question de la négociation collective pose en parallèle la question de la nécessaire évolution de la représentativité syndicale dans les entreprises de plus de 50 salariés...
Mesure :
L’accès à un code du travail numérique clair, accessible et compréhensible, répondant aux questions concrètes que se posent les chefs d’entreprise des TPE/PME et les salariés.
Notre avis :
Une mesure dont l’utilité est assez floue, dans le sens où la plateforme Légifrance remplit déjà ce rôle d’information auprès des salariés et des chefs d’entreprises. Tout dépendra du degré de précision des questions /réponses émanant du gouvernement que l’on pourra y trouver et de la valeur juridique des commentaires / exemples concrets publiés par l’Administration.
Mesure :

Un dialogue social simplifié et opérationnel, par la fusion des trois instances d’information et de consultation en une seule, le conseil social et économique (CSE), pour toutes les entreprises de plus de 50 salariés.
Le CSE aura des missions différentes selon le nombre de salariés au sein de l’entreprise :
En dessous de 50 salariés : les attributions seront les mêmes que celles du délégué du personnel.
Au-dessus de 50 salariés, les attributions sont les mêmes que celles du CE et du CHSCT.

Notre avis :
La fusion de ces trois instances va permettre de clarifier le dialogue social, en donnant plus de poids et de lisibilité à cette nouvelle instance, dont les missions reprennent pour l’essentiel celles des précédentes instances (DP, CE et CHSCT) auxquelles elles se substituent.
Il conviendra par ailleurs d’attendre les décrets du Conseil d’Etat pour connaitre le nombre de membres qui composeront le CSE et comprendre alors si, au-delà de la fusion, il est opéré une véritable rationalisation des mandats à travers l’instance unique, ce qui serait une bonne nouvelle pour les employeurs.
Néanmoins, il est prévu une hausse de la subvention de fonctionnement du CSE dans les entreprises de plus de 2.000 salariés, passant de 0,2% de la masse salariale à 0,22%, représentant ainsi un surcoût pour les entreprises.
Ce montant s’ajoute à la subvention destinée aux œuvres sociales et culturelles, sauf si l’employeur fait déjà bénéficier le comité d’une somme ou de moyens en personnel équivalents à 0,22% de la masse salariale.
Mesure :
Une gestion plus souple des budgets de fonctionnement et œuvres sociales.
Notre avis :
Sur délibération, il pourra en outre être décidé de transférer une partie de l’excédent du budget de fonctionnement au financement de la formation des délégués syndicaux ou à la subvention destinée aux œuvres sociales et culturelles.
Pour la première fois, il est établi la possibilité de gérer de manière plus souple les budgets du CSE, ce qui est positif pour les employeurs.
La limitation du nombre de mandats à 3 (sauf pour les entreprises de moins de 50 salariés) est un premier pas vers la modernisation de la vie syndicale mettant fin à une forme de professionnalisation à vie des représentants du personnel.
Mesure :
  • ➢  La possibilité accrue de promouvoir le dialogue social et la co-construction de la stratégie avec les salariés et leurs représentants, par la mise en place par accord majoritaire d’un conseil d’entreprise intégrant l’ensemble des fonctions de représentant du personnel (information, consultation, négociation).
  • ➢  La mise en place d’une codécision à la française, sur la formation professionnelle ou l’égalité femmes-hommes notamment, dans les entreprises mettant en place le conseil d’entreprise par accord majoritaire.
  • ➢  La possibilité de demander la reconnaissance d’une unité économique et sociale dès le franchissement du seuil de 11 salariés et non plus 50, permettant la mise en place d’un CSE commun.
    Notre avis :
    Si certains ont regretté que les ordonnances n’aient pas associé davantage les salariés à la gouvernance d’entreprise, il nous semble illusoire et contreproductif de vouloir instituer en France un modèle de cogestion à l’allemande. L’histoire de ces deux pays est beaucoup trop différente pour transposer le mécanisme de cogestion, ce qui n’empêche pas d’établir en France un dialogue social responsable et collectif.
    La mesure tendant à la reconnaissance d’une unité économique et sociale à partir du seuil de 11 salariés est passée assez inaperçue. Elle peut néanmoins constituer un vrai sujet pour certaines TPE...
    En outre, la question du relèvement des seuils évoquée depuis les avant-projets de loi El Khomri est à nouveau éludée. Pourtant, le caractère repoussoir du seuil de 50 salariés n’est plus à démontrer (mise en place de la participation et des obligations en matière de représentation du personnel). Le simple fait d’augmenter les seuils n’aurait- il pas permis de manière mécanique de créer de l’emploi ? Si l’on s’en tient aux statistiques :
  • ✓  1600 entreprises emploient 49 salariés alors qu’elles ne sont que 600 à en employer 50...
  • ✓  34 000 entreprises emploient 9 salariés alors qu’elles ne sont que 18 000 à en employer
    10...
    Mesure :
La régulation des expertises, par la mise en place d’une participation financière forfaitaire de 20% du coût des expertises par le conseil social et économique sur les expertises ponctuelles (sauf expertise PSE et risques graves, qui restent pris en charge à 100% par l’employeur, comme aujourd’hui).
Notre avis :
Le problème lié aux expertises n’est pas réglé : le payeur et l’ordonnateur desdites études sont des personnes différentes, aux intérêts divers.
On peut néanmoins espérer que ce mécanisme permette une certaine « moralisation » des cartels d’expertises que personne n’osait dénoncer... 

Rupture de contrats et licenciements
Mesure :
Un barème de dommages et intérêts impératif qui donne sécurité et visibilité sur les contentieux potentiels.
Notre avis :
Cette disposition permet d’encadrer les indemnités prud’homales, afin d’augmenter la visibilité pour les salariés et les employeurs du coût d’une rupture de contrat. Le
barème prévoit un plafond à 20 mois de salaires pour les salariés ayant 30 ans d’ancienneté dans la même entreprise, et un plancher fixé à 3 mois de salaire brut pour 2 années d’ancienneté.
La mise en place d’un barème clair et précis permet à chaque employeur d’anticiper le coût de licenciement minimum et maximum d’un salarié, afin d’internaliser un risque parfois exogène. Idem pour un salarié : la mise en place d’un plancher permet plus de visibilité en cas de fin prématurée de son contrat.
En outre, un barème spécifique est mis en place pour les TPE de moins de 11 salariés.
C’est le caractère contraignant du barème qu’il convient de saluer plus que son contenu qui n’est pas très éloigné du barème indicatif de la loi El Khomri, lui-même relativement calé sur la pratique judiciaire antérieure.
En outre, les licenciements qui « coutent cher » sont justement ceux exclus par les barèmes et plafonds. Dès lors, pas sûr que cette barémisation tant médiatisée soit la plus révolutionnaire des mesures...
La porté pratique de cette mesure devra être évaluée dans quelques mois en fonction de la façon dont les juges vont appréhender cette mesure.
Mesure :
La possibilité d’anticiper et de s’adapter rapidement aux évolutions à la hausse ou à la baisse du marché par des accords majoritaires simplifiés sur le temps de travail, la rémunération et la mobilité.
Notre avis :
Les accords collectifs permettront désormais à une entreprise d’adapter les conditions de travail, la rémunération et le temps de travail pour répondre aux besoins de fonctionnement de l’entreprise, sans mettre en danger l’ensemble de l’entreprise et la totalité des salariés. Si cette mesure va dans le bon sens, nous pouvons néanmoins regretter que l’absence d’accords offensifs, pourtant prévus dans la première version de la loi travail de 2016, qui auraient pu permettre à une entreprise de s’adapter pour conquérir de nouveaux marchés en améliorant sa compétitivité.
C’est une bonne mesure qui apporte de la souplesse aux entreprises sans nier la possibilité conservée par les salariés de refuser individuellement les modifications de son contrat.
Mesure :
Des indemnités légales de licenciement augmentées de 25%.
Notre avis :
Disposition demandée par une partie des syndicats et annoncée pour « équilibrer le texte ».
A noter que l’augmentation de 25% ne vaudrait que pour les salariés ayant moins de 10 ans d’ancienneté. Le projet de décret publié par l’AEF ne prévoit en effet aucune majoration pour les salariés ayant plus de 10 ans alors sue le texte actuel prévoit une indemnité majorée pour ceux-ci. Dès lors, le projet de décret spécifie que le taux d’augmentation serait de :
  • ✓  25% pour les salariés ayant au maximum 10 ans d’ancienneté,
  • ✓  21,4% pour les salariés ayant 11 ans d’ancienneté
  • ✓  7,1% pour les salariés ayant 25 ans d’ancienneté
  • ✓  4,4% pour les salariés ayant 38 ans d’ancienneté
    Mesure :
    Un abondement de compte personnel de formation de 100 heures financé par l’employeur, en cas de refus par le salarié d’un accord majoritaire signé par les organisations syndicales portant sur le temps de travail ou la rémunération.
    Une mesure à saluer, qui augmentera la capacité des salariés concernés à se former pour retrouver un nouvel emploi.
    Mesure :
    Sauf fraude, un périmètre d’appréciation du motif économique fixé au niveau national, comme dans la grande majorité des pays européens.
    Notre avis :
    Une excellente mesure qui va grandement participer à l’amélioration de l’attractivité du territoire français. Ainsi, on ne pénalise pas une entreprise française lorsque les filiales internationales se portent mal, et on incite l’Etat à créer et à entretenir un écosystème économique favorable aux entreprises.
    Reste à savoir comment sera interprétée la notion de « fraude » par la jurisprudence
Mesure :
Des procédures de reclassement plus transparentes et plus équitables, grâce à l’accès à l’ensemble des emplois disponibles dans l’entreprise et la fin du reclassement à l’étranger.
Notre avis :
Cette mesure est une très bonne nouvelle pour les entreprises de dimension internationale car elle sonne le glas d’une formalité inutile pour les salariés qui sont généralement déjà réfractaires à être reclassé dans un poste à quelques dizaines de kilomètres...
Mesure :
L’instauration de la rupture conventionnelle collective Notre avis :
L’une des mesures phares des Ordonnances réside sans conteste dans cette possibilité de mettre en place par accord majoritaire un plan de départs volontaires autonome, sans avoir à répondre, comme c’était le cas aujourd’hui, du formalisme rigoureux des PSE.
Cette disposition permet de conjuguer au pluriel le succès des ruptures conventionnelles mises en place sous le gouvernement Sarkozy. Elle tombe également à point nommé dans un contexte de bouleversement des métiers du secteur bancaire par nature très opposé aux plans sociaux. Elle permettra la mise en œuvre en douceur des baisses d’effectifs inévitables
La rupture conventionnelle collective est une mesure positive pour les employeurs qui n’ont plus à subir le formalisme du PSE mais sans doute à contre-emploi de l’objectif poursuivi (baisser le taux de chômage). En effet, les salariés ne bénéficieraient plus artificiellement du congé de reclassement ou du CSP imposés jusqu’à présent pour ne pas alourdir les statistiques... 

Simplification administrative
Mesure :
  • ➢  Une réforme des règles de licenciement permettant que les vices de forme ne l’emportent plus sur le fond.
  • ➢  Possibilité de compléter le motif invoqué par le licenciement après notification de la lettre de licenciement
    Un formulaire-type rappelant les droits et devoirs de chaque partie pour éviter les erreurs de procédure lors d’un licenciement.
    Notre avis :
    Dans l’idée de la simplification administrative, cette mesure apportera plus de sérénité aux employeurs, notamment aux patrons des TPE, qui ne seront ainsi plus sanctionnés pour un vice de forme, et dont chaque licenciement se jugera uniquement sur le fond. Il s’agit donc tout simplement d’une consécration du «droit à l’erreur» de l’employeur...
    Mesure :
    La suppression de contraintes administratives inapplicables en matière de déclaration administrative sur la pénibilité.
    Notre avis :
    Mesure demandée par les entrepreneurs des TPE et PME, elle permet à la fois de ne pas enterrer le projet de compte pénibilité dont l’utilité est incontestable, tout en supprimant les 4 contraintes administratives qui étaient intenables et irréalisables.
    Mesures :
    Des délais de recours harmonisés à un an en cas de contestation de la rupture du contrat de travail.
    Notre avis :
    Le passage à 12 mois pour une contestation de licenciement est une bonne nouvelle qui va permettre aux entrepreneurs de ne plus être dans l’attente d’une éventuelle contestation dans les 24 mois suivants la rupture d’un contrat. Ce délai aurait néanmoins pu être diminué à 6 mois afin que les risques inhérents à tous licenciements puissent être provisionnés sur un même exercice comptable.
Vie syndicale
Mesures :

➢ ➢
Un accès à la formation professionnelle et au bilan de compétences renforcé pour concilier engagement syndical et évolution professionnelle.
Une plus grande facilité à nommer un délégué syndical
en l’absence d’élus.
Le renforcement des possibilités d’évolution vers l’inspection du travail (par concours) pour les élus du personnel et les délégués syndicaux.

Notre avis :
On ne comprend pas très bien cette mesure qui ne pourra que renforcer aux yeux des chefs d’entreprise la vision d’une inspection du travail très partisane.
Mesure :
La création d’un observatoire de la négociation. Notre avis :
Notons à cet égard que la commission de refondation du Code du travail telle que prévue par l’article 1 de la Loi El Khomri est, quant à elle, supprimée avant même d’avoir vu le jour dès lors qu’elle n’avait plus d’objet. 

Contrat de travail
Mesure :
Des règles encadrant les CDD correspondant à la spécificité des secteurs d’activité, négociées et mises en place par accord de branche, dans le cadre de la nouvelle compétence de branche sur la gestion et la qualité de l’emploi.
Notre avis :
Cette mesure risque fortement de ne pas avoir l’effet escompté. En effet, en cas d’absence d’accord au sein de la branche, la référence restera la loi et il est fort
probable que le nombre de secteurs d’activité qui pourront disposer d’un accord de branche utile sur le sujet, sera très faible
La gestion et la détermination du nombre de CDD successifs auraient dû être décentralisées au sein de l’entreprise.
Mesure :
La possibilité d’accéder à des contrats de chantier grâce à la négociation d’accord de branche fixant les règles permettant d’y recourir.
Notre avis :
Dommage de ne pas avoir donné ce droit aux partenaires sociaux dans les entreprises. Ces CDI de chantier auraient pu ainsi devenir des contrats de mission intéressants pour l’activité, notamment dans les services.
Cette mesure aurait été à n’en pas douter un puissant levier de créations d’emplois mais on touche là aux limites de la concertation. 

Télétravail
Mesure :
Un droit au télétravail sécurisé, souple, permettant une meilleure conciliation de la vie professionnelle et de la vie personnelle.
Notre avis :
La France est en retard sur le télétravail par rapport aux autres pays européens (2% en France contre 30% en Europe). La mise en place de règles simples et incitatives pour le développement du travail permettra d’adapter la culture managériale en ce sens et ainsi favoriser une pratique à laquelle 26% des actifs sont éligibles, selon les calculs de nos experts. Cette mesure devrait également aider à lutter contre la désertification des régions, thème cher à la Fondation.

Guillaume Brédon, Avocat, expert en droit social à la Fondation Concorde
Anna Christina Chaves , Avocate, experte en droit social à la Fondation Concorde

Source


 
Powered By Blogger